Ron CARLSON – « Cinq ciels »

 

Ron CARLSON

 

Dans l’Etat d’Idaho au nord-ouest des U.S.A., deux ouvriers et un chef de chantier se retrouvent sur un gigantesque chantier de construction au bord d’un canyon au cœur des montagnes rocheuses sur lequel ils vont rester trois mois. Chacun d’eux vit avec le poids de son passé : Darwin Gallegos, contremaître du chantier, et sa femme décédée, Arthur Key, le colosse, et son frère mort, et le plus jeune, Ronnie Panelli, ancien voleur à la tire, encore immature. Dans des paysages grandioses, ces trois-là vont faire connaissance, se découvrir, se prendre d’amitié, en vivant ensemble toute la journée mais aussi la nuit puisqu’ils ont établi leur campement sur place, la première ville étant à une heure de route. Certes, ils ne se perdent pas en diatribes interminables, les échanges sont courts, laconiques. Il faut dire que le travail est dur, physique, harassant, et demande un minimum de concentration tant le chantier est démesuré. Les travailleurs apprendront sur le tard  l’utilité de la construction demandée par le propriétaire du terrain, Curtis Diff. Au cœur ce paysage extraordinaire, un drame va survenir en fin de livre. Ce roman se lit lentement, calmement, ici pas d’action à couper le souffle, on se laisse juste porter par la nature et les personnages simples en même temps que profonds, chacun avec sa blessure. Rien de bien joyeux niveau ambiance, mais rien de suffoquant non plus. Certains termes définissant l’évolution du chantier peuvent s’avérer très techniques, mais ils ne sont qu’un détail noyé dans l’immensité de l’environnement. La plume de CARLSON est agréable, puissante, pudique et précise, donne envie d’avancer toujours dans cette histoire qui ne laisse que peu de place à l’amour, seule l’amitié entre hommes comptant. Chaque mot compte, l’auteur ne se perd jamais en descriptions inutiles, il plante le décor, voilà tout. Le sentiment d’être happé par un roman d’initiation prend parfois le dessus. Très peu de rebondissements, d’évènements, et pourtant on se laisse totalement bercer par ce roman intimiste que l’on quitte même à regret. S’il fut sorti en 2007, il ne fut traduit en français qu’en 2012 et édité par la magnifique collection « Nature writing » des non moins magnifiques Editions GALLMEISTER.

 

(Warren Bismuth)